Madagascar, premier producteur mondial de vanille, fait face à une crise sans précédent. L’annonce par le gouvernement d’un stock excédentaire de 2 000 tonnes, dont la moitié basée à l’étranger, confirme les difficultés structurelles de la filière. La demande mondiale, estimée à 3 000 tonnes l’an dernier, peine à absorber une offre toujours plus abondante, provoquant une chute vertigineuse des prix. Alors que la vanille était vendue à 700 dollars le kilo en 2018, elle pourrait désormais se négocier à seulement 20 dollars le kilo.
Face à cette situation, le gouvernement malgache réitère son engagement à assainir la filière. La publication imminente de la liste des exportateurs agréés vise à évincer les opérateurs ne respectant pas les règles du marché. Mais ce contrôle renforcé suscite des tensions et soulève des interrogations sur la capacité des autorités à restaurer un équilibre durable.
Une crise aux lourdes conséquences
La chute des prix a des répercussions directes sur les producteurs locaux. En 2019, le prix minimum d’achat de la vanille verte était fixé à 50 000 ariary le kilo. Aujourd’hui, les planteurs doivent se contenter de 3 000 ariary (moins d’un dollar), un niveau qualifié d’« indécent » par le Groupement des exportateurs de vanille de Madagascar. Cette situation menace la durabilité de la filière, découragent les petits producteurs et favorise des pratiques informelles.
L’autre enjeu réside dans la perception du marché international. Madagascar doit non seulement garantir un prix plus juste aux planteurs, mais aussi rassurer ses clients sur la qualité de son produit. Les récents signalements de contaminants, comme la présence de nicotine et d’huiles minérales, posent un problème majeur de crédibilité et appellent à une traçabilité renforcée.
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Vers une diversification et une relance de la filière vanille
Pour sortir de cette impasse, Madagascar doit aller au-delà d’un simple assainissement. Il est urgent de diversifier ses marchés. Aujourd’hui, la majorité des exportations est destinée aux États-Unis, qui jouent un rôle clé dans la fixation des prix. Or, d’autres régions, comme l’Asie et le Moyen-Orient, pourraient être des relais de croissance stratégiques pour la filière.
Le symposium international sur la vanille, prévu à New York en avril, aurait pu être une opportunité pour Madagascar d’affirmer sa volonté de réforme. Pourtant, aucun représentant malgache ne figure parmi les invités. Un écart symptomatique d’une gestion encore perfectible de la filière.
Madagascar est à la croisée des chemins. Entre la chute des prix, les difficultés des producteurs et les doutes sur la qualité du produit, l’enjeu est de taille : restaurer la confiance du marché et garantir la viabilité à long terme de la filière vanille. Un assainissement efficace passe par une meilleure régulation, un soutien accru aux producteurs et une stratégie d’exportation plus diversifiée. Sans cela, Madagascar pourrait perdre son leadership mondial sur ce marché emblématique.
Tony A.