Trois jours après la mort tragique de sept personnes dans une mine d’or à Obuasi, région Ashanti, le Ghana est secoué par une polémique grandissante. Ces victimes, accusées de s’être introduites illégalement dans une concession appartenant à AngloGold Ashanti, ont été abattues par des militaires. Ce drame ravive les tensions chroniques entre les communautés locales et les grandes entreprises minières du premier producteur d’or en Afrique.
L’incident à Obuasi a provoqué une flambée de violences : véhicules incendiés, écoles fermées, et une commune en état de siège. Ce n’est pas la première fois que des affrontements éclatent autour des activités minières au Ghana, mais leur intensité ne cesse de croître.
Un contexte social et économique explosif
Daryl Bosu, directeur national adjoint de l’ONG environnementale A Rocha Ghana, pointe du doigt une profonde frustration sociale. « Les habitants des communautés se sentent marginalisés. Ils observent la prospérité des concessions minières, mais ne perçoivent aucun bénéfice tangible. Ce ressentiment, particulièrement vif chez les jeunes sans emploi, alimente les tensions », explique-t-il.
En toile de fond, une crise économique sans précédent depuis deux ans aggrave la situation. De nombreux Ghanéens se tournent vers l’orpaillage illégal, dit Galamsey, dans l’espoir de survivre. Cette pratique, déjà problématique par le passé, a pris une tournure plus violente ces dernières années.
La montée en puissance de l’orpaillage illégal est également facilitée par l’absence de réponse claire des autorités. La coalition ghanéenne contre le Galamsey accuse le gouvernement actuel d’un silence complice. « Depuis 2012, des acteurs influents ont encouragé les communautés locales à se saisir des ressources minières par tous les moyens, faute de partage équitable des profits », déclare Daryl Bosu.
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Le drame d’Obuasi, une remise en question nécessaire
Cette inaction a non seulement exacerbé les conflits, mais également mis en péril les grandes concessions minières, comme en témoigne le cas d’Obuasi. Pour AngloGold Ashanti, l’enjeu dépasse le simple maintien de l’ordre : il s’agit aussi de garantir la viabilité économique de ses opérations face à une contestation croissante.
Ce drame d’Obuasi une fois de plus les défis complexes du secteur minier au Ghana. Si les compagnies minières génèrent une part significative des revenus nationaux, elles peinent à gagner la confiance des populations locales, qui se sentent souvent dépossédées de leurs terres sans compensation adéquate.
Pour éviter que de tels événements ne se reproduisent, une réforme en profondeur s’impose. Il s’agit non seulement de mieux redistribuer les bénéfices de l’exploitation minière, mais aussi d’accompagner les communautés locales vers des alternatives économiques durables. Le drame d’Obuasi doit servir d’électrochoc. Le Ghana, riche de ses ressources aurifères, ne peut continuer à ignorer le fossé grandissant entre les entreprises minières et les communautés locales. Une politique intégrée, alliant justice sociale, partage équitable des ressources et réglementation stricte de l’orpaillage, est indispensable pour apaiser les tensions et garantir un développement harmonieux. Le défi est immense, mais il en va de l’avenir économique et social du pays.
Tony A.