Le Bénin a rappelé son ambassadeur au Niger, Gildas Agonkan, suite à des propos jugés contraires à la ligne officielle de Cotonou. Lors d’une cérémonie à Gaya, au Niger, le 1er février, Agonkan avait publiquement demandé pardon au peuple nigérien « au nom de tous les Béninois », une initiative qui a provoqué une vive réaction à Cotonou.
Cet épisode intervient dans un contexte de relations déjà fragilisées par la crise diplomatique née du coup d’État de juillet 2023 au Niger. L’ambassadeur, en poste depuis août 2024, a été convoqué pour consultations par le ministre des Affaires étrangères, Olushegun Adjadi Bakari, et son avenir diplomatique semble incertain. Selon des sources proches du pouvoir, la question a même été abordée lors du conseil des ministres du 12 février, preuve de sa gravité.
Un geste symbolique de Gildas Agonkan aux conséquences politiques
Les propos de Gildas Agonkan, bien que motivés par un esprit de fraternité, ont heurté les sensibilités politiques à Cotonou. En demandant pardon au peuple nigérien, il a pris une position publique perçue comme un aveu implicite de torts béninois, brouillant la ligne diplomatique du gouvernement.
Pour Cotonou, cette sortie est prématurée, car elle intervient alors que les deux pays cherchent à normaliser leurs relations dans un cadre officiel et maîtrisé. Cette prise de position a d’autant plus surpris que le Bénin s’efforce de maintenir une posture ferme tout en engageant un dialogue prudent avec Niamey. L’incident révèle une fracture entre la diplomatie de terrain et les orientations politiques du pouvoir central.
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Une crise aux multiples enjeux
L’affaire Gildas Agonkan fait rejaillir les tensions profondes entre le Bénin et le Niger depuis le coup d’État contre Mohamed Bazoum. Depuis juillet 2023, Cotonou, aligné sur la position de la CEDEAO, a adopté des mesures de pression contre Niamey, provoquant des frictions économiques et sociales, notamment dans les zones frontalières.
Cette crise reflète également les dilemmes stratégiques du Bénin, partagé entre solidarité régionale et défense de ses intérêts nationaux. Elle pose la question de la marge de manœuvre des diplomates face aux contraintes politiques.
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Quelles conséquences pour l’avenir diplomatique ? L’épisode pourrait avoir des répercussions durables sur la carrière de Gildas Agonkan. Un limogeage enverrait un signal fort sur l’importance de l’alignement diplomatique, mais risquerait de refroidir encore davantage les relations avec Niamey. Pour le Bénin, il s’agit de réaffirmer sa ligne diplomatique tout en préservant l’option du dialogue avec le Niger. Cette affaire souligne la nécessité d’une diplomatie cohérente et d’une communication stratégique dans les contextes de crise.
L’affaire Gildas Agonkan dépasse le cadre d’un simple rappel d’ambassadeur. Elle met en relief les tensions régionales post-coup d’État et les difficultés de concilier solidarité, fermeté et dialogue. Pour le Bénin, l’enjeu est double : réaffirmer son autorité diplomatique tout en ouvrant la voie à une désescalade avec le Niger. Cet épisode rappellera sans doute l’importance d’une diplomatie prudente, surtout en période de tensions.
Tony A.