Des chiffres terrifiants, une réalité glaçante. L’UNICEF tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur la situation catastrophique des enfants dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), où des milliers d’enfants ont été victimes de viols et violences sexuelles en seulement deux mois, entre janvier et février 2025. Ces agressions, perpétrées dans un contexte de conflit armé, illustrent une spirale de barbarie devenue presque invisible à force de répétition, et désormais qualifiée par l’organisation onusienne de « crise systémique ».
Alors que les combats s’intensifient autour de Goma et Bukavu, tombées entre les mains du groupe armé M23, soutenu par le Rwanda selon plusieurs sources, les violences sexuelles deviennent une arme de guerre à part entière, utilisée pour fracturer durablement les communautés. Ce ne sont plus des incidents, mais un outil stratégique de domination, d’intimidation et de terreur, dirigé contre les plus vulnérables : les enfants.
Des milliers d’enfants victimes de viols
Selon les données recueillies par l’UNICEF, les enfants représentent entre 35 et 45 % des 10 000 cas de violences sexuelles recensés au début de l’année. Certains, encore tout-petits, subissent des actes dont l’inhumanité dépasse l’entendement. Derrière chaque chiffre, il y a un nom, une histoire brisée, comme celle de cette jeune fille de 13 ans, violée puis enceinte, contrainte de subir une césarienne en raison de son âge.
Ces atrocités ne relèvent plus d’une simple conséquence collatérale des combats : elles traduisent une stratégie de guerre asymétrique, où le corps des enfants devient un champ de ruines volontairement exploité pour détruire psychologiquement familles et communautés. En sapant la capacité de résilience des civils, les groupes armés entendent ainsi imposer leur domination par la peur. L’impunité persistante des auteurs, souvent connus mais jamais jugés, alimente ce cycle infernal.
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Une tragédie aggravée par le désengagement international
Le cri d’alarme de l’UNICEF est aussi un appel à la solidarité internationale. Les coupes budgétaires imposées par le retour de Donald Trump à la présidence américaine ont porté un coup fatal aux missions humanitaires. Des dizaines de rescapées n’ont plus accès aux kits de soins post-viol. La prophylaxie post-exposition (PEP), pourtant essentielle pour prévenir les infections VIH ou les grossesses, devient un luxe. Dans les hôpitaux de fortune de Goma, les médecins improvisent, les ONG se battent sans moyens, pendant que les bailleurs ferment les yeux.
Cette désolidarisation du Nord, au moment où la RDC vit l’une de ses plus grandes crises humanitaires, pose la question de l’abandon silencieux d’un peuple. La protection des enfants dans les conflits ne peut être une option, encore moins un sacrifice collatéral aux jeux d’intérêts diplomatiques ou à la lassitude de la communauté internationale.
Il est temps d’en finir avec l’indifférence. La situation en RDC n’est pas une tragédie isolée ; elle est le reflet d’un monde qui a appris à détourner le regard lorsque les victimes sont africaines, pauvres, et sans voix. Tant que la justice n’est pas rendue, tant que les financements ne sont pas débloqués, tant que les auteurs ne sont pas jugés, le viol restera une arme efficace et tolérée de guerre. Redonner à ces enfants la dignité, la sécurité, et la justice est une responsabilité collective. Il ne s’agit pas seulement de reconstruire des vies, mais de préserver ce qui reste d’humanité dans un monde de plus en plus fragmenté.
Tony A.