La Côte d’Ivoire, leader mondial de la production de cacao, fait face à une pression sans précédent sur son marché national. Depuis début novembre, les prix des fèves connaissent une hausse spectaculaire. Une situation attisée par les craintes d’une offre insuffisante.
Alors que les cours mondiaux explosent atteignant 11 081 dollars la tonne pour une livraison en mars à la bourse de New York, la filière ivoirienne est confrontée à une double menace. Il s’agit entre autres de la fraude massive à la frontière et des contraintes bancaires qui freinent les exportateurs et industriels.
La fraude, un fléau amplifié par les prix élevés du cacao
Avec un prix fixé à 1 800 FCFA par kilo pour les producteurs locaux, le cacao ivoirien devient un produit lucratif pour les trafiquants. À la frontière guinéenne, le même kilo se revend jusqu’à 5 000 FCFA, attirant de plus en plus d’acteurs vers le marché parallèle. Dans l’espace de trois mois, il y a environ 50 000 tonnes de fèves qui auraient été commercialisées illégalement, selon des estimations non officielles.
Cette situation inquiète les exportateurs, qui voient leurs marges et leurs volumes fondre. Chaque tonne de cacao détournée alimente le sentiment de pénurie et contribue à faire grimper les primes versées aux intermédiaires. Là où elles étaient de 100 FCFA, elles atteignent désormais jusqu’à trois fois ce montant, rendant le marché encore plus instable.
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Des contraintes bancaires qui freinent le secteur
En parallèle, les acteurs de la filière doivent composer avec un soutien limité des banques locales. Alors que les prix payés aux producteurs ont doublé en un an, les institutions financières ivoiriennes n’ont pas ajusté leurs financements en conséquence.
Pour les broyeurs et exportateurs, cela se traduit par des fonds de roulement insuffisants, les obligeant à chercher d’autres sources de financement. Cette situation accentue le risque de manque des volumes de cacao indispensables pour répondre à la demande, et fragilise davantage une filière déjà sous pression.
La filière cacao ivoirienne se trouve à une critique tournante. Entre fraude massive, hausse des coûts et accès limité aux financements, le premier producteur mondial doit trouver rapidement des solutions pour stabiliser son marché.
Tandis que la production tend naturellement à diminuer en début d’année, le défi est d’autant plus grand. La Côte d’Ivoire devra redoubler d’efforts pour protéger son secteur stratégique et éviter que la flambée des prix ne se transforme en une véritable crise économique et sociale.
Tony A.