Comme à ses habitudes, le Chef de l’État togolais a entrepris un dialogue avec la junte nigérienne au moment même où la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) brandit l’intervention militaire après l’échec des missions de médiation. Plusieurs s’élèvent. Mais pour Faure GNASSINGBÉ, l’usage de la force n’est pas la solution.
L’information n’est pas passée inaperçue, en plus d’avoir surpris plus d’un. En réalité pas vraiment, surtout les capitales africaines et les chancelleries internationales. L’entrée en scène du Chef de l’État togolais dans une résolution de la crise au Niger n’était pas attendue au regard des sanctions sévères activées par la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et un possible recours à une intervention militaire. Mais elle est tant espérée des parties. Dans la sous-région, Faure GNASSINGBÉ est le plus actif en matière de facilitation et de dialogue entre des frères devenus, l’instant d’un mécontentement ou d’une frustration, des ennemis. Et bien de succès plaident pour ce noble engagement : Mali, Guinée, Guinée-Bissau, Burkina Faso, Tchad ou encore le Soudan… » Il est aimé et écouté par ses pairs de la région. Pas seulement grâce à son leadership partagé mais aussi, et surtout, grâce au modèle de stabilité politique de son pays », a résumé le journaliste béninois A.G.
La noble initiative du Président togolais
En rencontrant donc lundi dans la plus grande discrétion, comme à ses habitudes, des membres de la junte nigérienne à Pya, le Chef de l’Etat a décidé d’ouvrir un nouveau chapitre de son sacerdoce diplomatique. Mais cette fois-ci avec un chantier plus complexe que les précédents. Le putsch du Niger, au-delà des condamnations de la communauté internationale et des organisations régionales, a un caractère de trop surtout que ses motivations sont jugées très légères par certains observateurs. Ces derniers estiment l’absence d’éléments objectifs postulant à un coup de force militaire contre Mohamed Bazoum. Pour cela, les Chefs d’État et de Gouvernement ont opté prioritairement pour la fermeté sans fermer la porte à la médiation. Mais toutes semblent sans suite. De Patrice Talon du Bénin à Mahamat Idriss Déby du Tchad, des délégations de la CEDEAO, de l’Union Africaine et des Nations-Unies, tous ont essuyé des camouflets de la junte. Certes, Victoria Nuland, du Département d’État américain, a pu s’entretenir avec le nouveau Chef d’Etat-Major, Moussa Salaou Barmou sans une réelle avancée. Dans le même temps, l’ultimatum de la CEDEAO arrivait à expiration le 06 Août. Dès lors, à l’inquiétude populaire, l’intervention militaire prévue n’était pas très utile, car pour de nombreux spécialistes, elle risque de fragiliser davantage une région très instable. Dans un tel contexte, l’initiative du Président togolais d’ouvrir un couloir de discussion avec la junte s’annonce salvatrice. Non seulement, elle a le mérite de renoncer à la guerre et montrer la volonté des putschistes nigériens à dialoguer. D’ailleurs, ce sont ces derniers qui se sont rendus à Pya pour rentrer Faure GNASSINGBÉ. Selon des sources concordantes, les Forces Armées Togolaises (FAT) ont sursis leur participation à toute intervention.
L’enjeu est la paix et de la stabilité dans l’espace régional
En agissant ainsi, le leader togolais privilégie au grand souhait même de ses pairs, des solutions pacifiques au détriment de la violence de tout genre. Ses aptitudes sont un réel atout. Il se distingue par un sens aigu de l’écoute, l’explication et de la concertation en cohérence avec la diplomatie togolaise dont les priorités sont le renforcement de l’attractivité du Togo sur le plan économique, la construction et à la consolidation de la paix et de la stabilité dans notre espace régional sans omettre l’influence du Togo dans le concert des nations. « Ses multiples voyages sont parfois destinés à écouter et surtout recueillir des confessions. Il voyage beaucoup et envoie de nombreux émissaires dont son ministre des Affaires Etrangères, Robert Dussey. Il se déplace quand il faut pour expliquer et comprendre », confesse un habitué du Palais de Lomé. Dès lors, l’action du Président togolais ne saurait s’apparenter à une caution politique du Togo au coup d’État au Niger. Bien loin de là. Elle part du constat d’une dégradation continue de l’environnement sécuritaire régional qu’une intervention militaire ne fera que fragiliser davantage. Surtout que la Charte des Nations Unies, elle-même ne prévoit aucune disposition relative à l’usage de la force pour régler un différend de politique intérieure. Les seules conditions prévues pour l’usage de la force pour intervenir dans un pays est l’ingérence humanitaire dans le cadre de la Responsabilité de protéger (R2P). La démarche de Faure GNASSINGBÉ s’inscrit dans ce cadre et ne souhaite guère une bis repetita de la Libye ou de la Côte d’Ivoire en 2011 où l’usage de la force s’est révélé très tragique pour les populations civiles.