L’évacuation des marchands de rue du centre-ville d’Antananarivo, initiée par la nouvelle maire Harilala Ramanantsoa, fait grand bruit. Ces vendeurs, qui occupent les trottoirs de l’avenue de l’Indépendance, constituent une véritable épine dorsale de l’économie informelle malgache. Si la décision vise à réorganiser l’espace urbain et renforcer la sécurité, elle suscite également des inquiétudes quant à ses conséquences sociales et économiques.
En écartant les marchands de rue du centre historique, la municipalité souhaite fluidifier la circulation et restaurer l’image d’Analakely, une zone emblématique de la capitale. Ce type d’initiative a déjà été tenté par le passé, sans succès durable. Les précédentes municipalités ont été confrontées à une résistance farouche des marchands de rue, qui finissaient par regagner leur emplacement stratégique. Cette fois-ci, le plan semble plus strict. Des agents de police sont mobilisés pour encadrer l’opération, avec la promesse de sanctions en cas de non-respect. Cependant, la précarité des vendeurs et leur dépendance à cet emplacement pourraient rendre l’application de la mesure difficile.
Des marchands de rue désillusionnés et en colère
Pour Tranquille, vendeur de montres, cette décision est perçue comme une trahison. « C’est une vraie trahison. Ici, on a tous voté pour la nouvelle maire, car elle vient, comme nous, du monde du commerce. » En effet, Harilala Ramanantsoa, créatrice de la Grande Braderie de Madagascar, était perçue comme une figure proche des petits commerçants. Son choix de les déplacer choque et inquiète.
D’autres vendeurs, comme Rakoto, soulignent les risques sociaux de cette mesure. L’absence de revenus pourrait exacerber la délinquance et déstabiliser encore plus une population déjà fragilisée. Pour Vololonirina, vendeuse de sodas depuis 15 ans, il est impensable d’abandonner un lieu aussi lucratif : « On a déjà essayé de nous faire partir, mais on a toujours réussi à revenir. Cette fois-ci, il paraît qu’on veut nous reloger quelque part, mais c’est ici que les affaires marchent le mieux ! »
Lire Aussi : Présidentielle 2025 : Tidjane Thiam coupe les ponts avec la France et fonce vers le pouvoir
Un fragile équilibre entre modernisation et survie économique
Cette expulsion pose un problème un enjeu majeur : comment conjuguer modernisation urbaine et inclusion économique ? L’avenue de l’Indépendance est un centre névralgique pour de nombreux foyers malgaches. L’absence d’alternatives viables pour les marchands de rue risque d’aggraver la pauvreté et de pousser certains vers l’illégalité.
Le succès de cette politique reposera sur la capacité de la mairie à proposer un véritable plan de relocalisation. Si aucun compromis n’est trouvé, l’histoire risque de se répéter : les marchands de rue reviendront, et la décision sera difficile à faire appliquer. Pour l’instant, le climat est tendu et l’issue incertaine.
Tony A.