Les bras de fer juridique entre Orano, le géant français de l’uranium, et la junte militaire au pouvoir au Niger s’intensifient. Mardi 21 janvier, Orano a annoncé avoir déposé une seconde requête d’arbitrage international, cette fois-ci auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), basé à Washington. Cette démarche fait suite à la perte de contrôle de sa filiale Somaïr, dernière mine encore active du groupe dans le pays.
Orano, actionnaire majoritaire à 63,4 % de Somaïr, accuse l’État du Niger d’avoir entravé la commercialisation de l’uranium produit par cette filiale, ce qui aurait aggravé sa situation financière. Selon l’entreprise, les tentatives de résolution amiable sont conservées sans réponse, laissant l’arbitrage comme ultime recours. Cette action s’inscrit dans un contexte de rupture progressive entre Niamey et l’ancien partenaire stratégique français, exacerbée par le retrait en juin dernier du permis d’exploitation du gigantesque gisement d’Imouraren, également contrôlé par Orano. Une première procédure avait été lancée fin 2023 devant la Cour commune de justice et d’arbitrage de l’OHADA, à Abidjan.
Un bras de fer symbolique et stratégique pour Orano
Dans cette nouvelle plainte, Orano réclame des dommages et intérêts, ainsi que la récupération des stocks de concentré d’uranium, évaluées à environ 300 millions d’euros. Ces revendications témoignent de l’ampleur des pertes que le groupe estime avoir subies à la suite de cette crise.
Le conflit entre Orano et le Niger ne se limite pas à un simple différend commercial. Il s’inscrit dans un contexte géopolitique complexe, marqué par la remise en cause des liens traditionnels entre la France et ses anciennes colonies africaines. Depuis le coup d’État militaire au Niger en 2023, la junte au pouvoir a multiplié les décisions visant à réduire l’influence française dans le pays, y compris dans le secteur minier.
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Le Niger, qui abrite certaines des plus importantes réserves d’uranium au monde, représente un enjeu stratégique non seulement pour Orano, mais aussi pour l’approvisionnement énergétique de nombreux pays occidentaux. La perte de contrôle de ses actifs nigériens met en lumière les défis auxquels sont confrontées les entreprises étrangères opérant dans des environnements politiquement instables.
Ce litige pourrait non seulement redéfinir les relations économiques entre le Niger et ses partenaires internationaux, mais également impacter les marchés de l’uranium. Tandis qu’Orano cherche à défendre ses intérêts, la junte nigérienne semble déterminée à affirmer sa souveraineté sur les ressources nationales. L’émission de ces arbitrages pourrait avoir des retombées durables sur le secteur minier et les investissements étrangers en Afrique de l’Ouest.
Tony A.