samedi, novembre 23 2024

Lorsque l’on évoque les murs imposants du monde, la Grande Muraille de Chine vient immédiatement à l’esprit, une structure conçue il y a plus de deux millénaires pour protéger la Chine des invasions mongoles. Mais connaissez-vous le deuxième mur le plus long au monde ? Il se trouve en plein cœur du Sahara, en Afrique, et porte le nom de « Berm ». Cet immense mur de sable a été érigé par les Marocains dans le Sahara occidental. Et sa longueur est presque équivalente à la distance entre Paris et Moscou.

Cependant, ce n’est pas seulement sa taille (jusqu’à 5 mètres de hauteur) qui impressionne, mais aussi le fait que l’armée marocaine a enterré des centaines de milliers de mines le long de ce mur, en faisant ainsi le plus long champ de mines au monde. Ce mystérieux mur Berm est équipé de mines, de radars, et de capteurs hautement sophistiqués. À intervalles réguliers, des bases militaires se dressent le long de ce colossal rempart. Plus de 100 000 soldats marocains surveillent en permanence le désert. Mais pourquoi les Marocains ont-ils construit de telles fortifications dans le désert ? Contre quel ennemi redoutable se protègent-ils ? Et pourquoi d’autres pays de la région construisent-ils également leurs murs de sable ? Pour le découvrir, plongeons-nous dans cette énigme géopolitique.

Les frontières contestées du Sahara Occidental

Le Sahara Occidental est un territoire contesté, avec le Maroc d’un côté et les Sahraouis, représentés par le Front Polisario, de l’autre. Berm, ce mur colossal est le résultat de décennies de conflit. C’est une frontière physique et politique, un point de tension dans cette région aride.

Selon les Nations Unies, le Sahara occidental est un territoire non autonome. Cependant, pour le Maroc, le Sahara occidental est indiscutablement marocain. En fait, au Maroc, il est strictement interdit de parler du « Sahara occidental ». On préfère utiliser le terme « provinces du Sud ». Cette question épineuse fait partie des trois sujets tabous au Maroc, aux côtés du roi et de la religion.

Les Marocains, craignant les incursions du Front Polisario (un groupe sahraoui qui réclame l’indépendance du Sahara occidental depuis plus d’un demi-siècle), ont donc érigé Berm, ce mur complexe. Il est composé de plusieurs murs interconnectés, surveillés en permanence par des soldats marocains. Ces remparts sableux ne sont pas seulement physiques ; ils symbolisent les litiges territoriaux, les conflits d’identité et les enjeux économiques qui persistent dans cette région.

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La marche verte et la guerre d’indépendance

Pour comprendre pourquoi ce mur gigantesque a été construit, il est important de se référer à l’histoire tourmentée de la région. En 1975, l’Espagne annonce son retrait du Sahara occidental, après presque 200 ans de colonisation espagnole. Le roi du Maroc de l’époque, Hassan II, saisit immédiatement l’occasion pour revendiquer ce territoire et lance « La marche verte », où 350 000 Marocains pénètrent dans ces terres convoitées. Cela mène à une division du Sahara occidental, où le Maroc obtient les deux tiers du territoire, tandis que la Mauritanie hérite du reste.

Cependant, le Front Polisario, déjà en lutte contre l’occupant espagnol, proclame la création de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) et déclare la guerre aux nouveaux colons. La Mauritanie, face aux attaques du Front Polisario, fini par céder en août 1979. Mais quatre jours plus tard, le Maroc annonce que l’ancien territoire mauritanien lui appartient désormais. Soutenu par l’Algérie, le Front Polisario multiplie les attaques contre le Maroc. C’est à ce moment que le Berm voit le jour.

La meilleure solution trouvée par l’État marocain pour arrêter les incursions sahraouies a été de construire ce mur. Mais il ne s’agit pas d’un seul mur, mais d’une série de murs. Entre 1980 et 1987, le Maroc a érigé les six principaux murs qui forment le Berm. Soulignons que cette région renferme des ressources naturelles vitales, notamment des mines de phosphate, représentant 70 % des réserves mondiales. Un contrôle économique qui a propulsé le Maroc au rang de deuxième producteur mondial après la Chine.

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Attente d’un référendum

À l’ouest du Berm, l’ancienne colonie espagnole a connu de profonds changements, mais à l’est du mur, la situation est restée figée. Les Sahraouis attendent toujours la tenue d’un référendum d’autodétermination, qui avait été promis lors des accords de cessez-le-feu signés avec le Maroc en 1991. Cette situation a des conséquences graves, car elle a séparé des familles, et la population sahraouie en exil dépend fortement de l’aide humanitaire en raison du manque d’activité économique dans les camps de réfugiés de Tindouf, en Algérie, près de la frontière marocaine.

Alors que l’ONU considère ce territoire comme non-autonome, le Maroc insiste sur son appartenance au royaume. La situation s’est compliquée avec la reconnaissance officielle par les États-Unis et Israël de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Cela a non seulement renforcé le statut du Berm en tant que frontière, mais a également encouragé d’autres pays de la région à ériger des structures similaires.

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Berm comme une généralisation des murs de sable

Berm le mur marocain, autrefois une exception, est devenu un modèle pour d’autres pays de la région. Depuis les bouleversements politiques de 2011 et 2012, notamment la chute du régime de Kadhafi, l’Afrique du Nord a été confrontée à une instabilité croissante. La montée du terrorisme, le trafic d’armes et de drogues ont incité plusieurs pays, dont l’Algérie, la Libye, la Tunisie et l’Égypte, à ériger des murs de sable le long de leurs frontières.

L’Algérie, en particulier, a construit en toute discrétion un mur de sable à ses frontières à partir de 2015, non seulement à la frontière marocaine, mais aussi avec le Niger, le Mali et la Mauritanie. Cette barrière, bien que difficilement perceptible depuis le ciel, a cloisonné le gigantesque Sahara, représentant un obstacle insurmontable pour de nombreux nomades et migrants qui tentent désespérément de traverser le désert.

Les questions persistent : Pourquoi ces murs de sable, ces frontières invisibles, séparent-ils les terres arides ? Quel est le prix de ces frontières pour les peuples qui les habitent ? Ces murs, témoins silencieux d’histoires entrelacées, continueront à façonner le destin de ceux qui vivent dans l’ombre de leur présence.

Steven Edoé Wilson

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