Présidentielle en Côte d’Ivoire : quand Soro, désespéré, veut entraîner les autres dans sa chute
La candidature de Soro Guillaume a été rejeté à la présidentielle du 31 octobre prochain par le Conseil constitutionnel. Frustré, ce dernier veut empêcher le scrutin, par « tous les moyens légaux et légitimes ». Ainsi, M. Soro ne compte pas soutenir les autres candidats de l’opposition dont les candidatures sont retenues. D’ailleurs, l’ex-chef de la rébellion a demandé à ceux-ci de renoncer à participer à cette élection qui est, selon lui, truquée d’avance.
« S’il y a élection, c’est qu’on est dedans. Si on n’est pas dedans, c’est qu’il n’y a pas élection ». Guillaume Soro est clair : il ne va pas boycotter la prochaine présidentielle, mais va plutôt l’empêcher de se dérouler. Pour le leader de GPS, Générations Peuples Solidaires, l’élection présidentielle du 31 octobre prochain ne peut pas avoir lieu sans lui.
En effet, comme annoncé depuis mardi à la suite du rejet de sa candidature, Guillaume Soro s’est entretenu avec la presse française. C’est hier jeudi, à l’hôtel Bristol à Paris. Celui-là même que Alassane Ouattara a qualifié de marxiste, s’est voulu menaçant, dans un discours qui frise la défiance et l’appel à la révolte ou l’insurrection. « Ecrivez : Guillaume Soro dit qu’il n’y aura pas d’élection en Côte d’Ivoire », a-t-il glosé, avant de marteler « le scrutin n’aura pas lieu tant qu’on ne sera pas candidat ».
Entraîner les autres dans sa chute ?
En voulant empêcher le scrutin de se tenir, Guillaume Soro annonce implicitement qu’il ne soutiendra aucun candidat en lice. D’ailleurs, comment pourrait-il en être autrement, alors qu’il rejette la quintessence de cette élection ? « Maintenir cette élection du 31 octobre 2020 n’a aucun sens. C’est une évidence. De même, participer à cette élection serait cautionner le coup d’Etat civil de M. Ouattara.
J’en appelle, donc, à une unité d’action de l’opposition pour stopper M. Ouattara dans sa folle aventure, par tous les moyens légaux et légitimes », a déclaré, Guillaume Soro. Et d’ajouter « Ensemble, nous devons organiser la mobilisation de tout le peuple ivoirien depuis la campagne, les hameaux, les villages et les villes pour faire barrage au troisième mandat inconstitutionnel et interdit de M. Ouattara ».
Pour l’ex-Premier Ministre, participer à cette élection reviendrait à cautionner le troisième mandat d’Alassane Ouattara et à le légitimer. Il opte donc pour une stratégie radicale : l’insurrection. Dans cet ordre d’idées, Guillaume Soro convie ses pairs de l’opposition, notamment Bédié, le FPI (toutes branches confondues), Amon Tanoh etc. Cependant, les candidatures de Amon Tanoh et Laurent Gbagbo n’ayant pas été retenues, on peut comprendre que ceux-ci soient tentés de suivre Soro.
Mais, quid de Bédié et Affi N’Guessan ? Si les deux derniers refusent de poursuivre la course électorale, il n’y aura plus d’opposants pour affronter Ouattara. Or, si ces opposants n’arrivent pas à empêcher le scrutin, Ouattara gagnera dès le premier tour. En optant pour ce pari risqué, Guillaume Soro, qui n’a plus rien à perdre, n’est-il pas en train de conduire les autres dans sa chute ?
D’ailleurs, à tout point de vue, cet appel a moins de chance de prospérer. Quel intérêt Bédié, Affi et KKB ont à suivre un appel lancé très loin du pays ? Ce serait devenir les métayers de Soro sur le champ de la Côte d’ivoire. C’est synonyme de participer à embraser un pays qu’on souhaite gouverner. Paradoxe !
Guillaume Soro condamné à 20 ans de prison, est juridiquement inéligible
Depuis le 23 décembre 2019, Guillaume Soro est contraint de vivre loin de son pays, victime, selon lui, des « montages grossiers habillés par des artifices juridiques ». En effet, accusé de recel de biens publics, l’homme nie et dénonce un complot. C’est cette condamnation qui a valu la radiation de son nom sur la liste électorale. Radiation qui le rend de facto inéligible au prochain scrutin.
Néanmoins, en accusé, il donne des arguments pour se disculper. « Non seulement ces faits sont imaginaires mais cette infraction, si jamais elle avait existé, aurait été légalement prescrite : l’article 7 du code de procédure pénale ivoirien prévoit en effet que « en matière de délit, la prescription de l’action publique est de trois années révolues ».
À considérer, par extraordinaire, que ce délit soit qualifié de corruption, là encore, le délai de prescription éteint l’action publique, puisqu’il est de 10 ans. De sorte qu’en 2019, soit 13 ans après, les faits étaient prescrits. Or en réalité, tout ça n’existe pas : il n’y a aucune charge, aucun début de commencement de preuve. », a expliqué l’ex-protégé d’Alassane Ouattara.
Ces arguments restent à faire valoir devant une juridiction qui jugerait de sa pertinence juridique ou non. Par ailleurs, il évoque, avec ses avocats, la décision de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples prise, le 15 septembre 2020. Cette décision sera difficilement applicable étant donné que la Côte d’ivoire a quitté le protocole d’adhésion à la Cour. Ceci étant, elle n’a plus sa raison d’être convoquée dans ce débat.
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