Le parti au pouvoir au Togo, l’Union pour la République (UNIR), a largement remporté les élections municipales tenues le 17 juillet 2025. Avec 75 % des suffrages exprimés et 1 150 sièges sur les 1 527 en jeu. Cette victoire conforte la mainmise du président Faure Gnassingbé sur le pays, malgré une transition institutionnelle vers la Ve République.
Alors que plus de 4,5 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes, le taux de participation n’a atteint que 55,15 %, traduisant un intérêt modéré de la population pour ce scrutin local. Ce faible engouement électoral contraste fortement avec les tensions politiques qui traversent le pays. L’abstention observée traduit un certain désintérêt, voire une lassitude des électeurs vis-à-vis d’un processus démocratique perçu comme verrouillé. Nombreux sont les Togolais qui, confrontés à la récurrence des résultats largement en faveur du parti au pouvoir, ont préféré rester en marge du vote, estimant que leur voix n’aurait qu’un poids symbolique.
Une victoire écrasante mais attendue de l’UNIR
Le score fleuve de l’UNIR est sans surprise pour bon nombre de citoyens. Cette victoire, bien que légale, interroge sur la pluralité politique au Togo et la capacité réelle des autres formations à exister. L’Alliance nationale pour le changement (ANC), principal parti d’opposition, n’a recueilli que 51 sièges, confirmant l’érosion de son influence dans un environnement où les conditions de compétition électorale sont souvent dénoncées comme inéquitables.
Au-delà des chiffres, cette victoire s’inscrit dans une logique plus large de contrôle du territoire. En raflant la quasi-totalité des mairies, l’UNIR s’assure une emprise sur les relais de proximité, renforçant sa capacité à influencer les dynamiques sociales et économiques locales, mais aussi à encadrer les prochaines échéances électorales. Dans une République où le rôle du président est désormais “honorifique”, les collectivités deviennent des terrains stratégiques de pouvoir et de mobilisation politique.
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Une opposition fragmentée face à un pouvoir bien rodé
Si les résultats sont en attente de validation par la Cour Suprême, plusieurs partis ont déjà annoncé leur intention de déposer des recours, dénonçant des irrégularités, des cas d’intimidation et un accès inégal aux médias. La tenue de ces élections dans un climat de manifestations contre le pouvoir a jeté une ombre sur le processus. Derrière cette victoire municipale se dessinent des enjeux bien plus larges. Elle confirme non seulement le poids de l’UNIR dans l’échiquier politique togolais, mais aussi les limites du pluralisme dans le nouveau régime parlementaire. Si le scrutin avait pour but de consolider la décentralisation, il pourrait au contraire accentuer la centralisation du pouvoir sous une autre forme, plus insidieuse.
Togo : Faure Gnassingbé, artisan discret d’une gouvernance inclusive
Malgré une présence historique et des figures charismatiques, l’opposition togolaise peine à s’imposer comme une véritable alternative face au régime en place. Son incapacité à s’unir autour d’une stratégie commune, conjuguée à un déficit de relais locaux et à une méfiance persistante de la population, fragilise ses ambitions électorales. Les scrutins se suivent et se ressemblent : faibles performances, contestations post-électorales sans effets, et une dynamique militante en perte de vitesse.
Pendant ce temps, l’UNIR consolide méthodiquement son emprise sur l’appareil étatique et le tissu local, rendant tout rééquilibrage politique de plus en plus difficile. À chaque échéance, l’opposition semble davantage jouer en défense, dans un terrain verrouillé par un pouvoir aguerri à la gestion des rapports de force. Pendant que l’opposition peine à trouver un nouveau souffle et que la société civile reste sous pression, la route vers une démocratie inclusive et équilibrée reste semée d’embûches. Le scrutin du 17 juillet aura donc surtout servi à réaffirmer un rapport de force déjà bien établi, dans un Togo où le changement de régime ne rime pas encore avec changement de système.
Tony A.

