Le mardi 24 aout 2021, le monde entier a été surpris par l’annonce du décès de Hissène Habré, ancien président du Tchad. Ce dernier est mort au Sénégal où il était condamné à perpétuité pour plusieurs chefs d’inculpation. Il s’agit notamment d’enlèvements, d’exécutions et des crimes contre l’humanité. Selon les informations recueillies auprès de Fatimé Raymonne Habré, l’ancien président aurait contracté le Covid-19.
Après des années de lutte pour les victimes de la dictature mise en place par Hissène Habré pour se maintenir au pouvoir, le verdict de sa condamnation avait été prononcé par les Chambres africaines extraordinaires établies au sein du système judiciaire sénégalais. Cette dictature, bien que marquée par une violation flagrante des droits de l’homme et des principes démocratiques, avait énormément bénéficié du soutien indéfectible des grandes démocraties et puissances comme les Etats-Unis et surtout de la France. Quelles sont les principales raisons ayant motivé ce soutien fort et contre nature de la France à l’ancien président malgré ses abus ?
Soutien de la France à Hissène Habré, la contradiction
Tout au long de son règne, Hissène Habré a été soutenu par la France, qu’importe les méthodes brutales utilisées sur ses concitoyens. « Les États-Unis et la France étaient bien informés sur les moyens brutaux employés par Habré, mais ils ont quand même continué à le soutenir », avait déclaré Reed Brody, conseiller juridique à Human Rights Watch, qui a travaillé avec les victimes de Hissène Habré depuis 1999.
En effet, le soutien de la France s’est matérialisé par des aides logistiques conséquentes et des renseignements cruciaux. Des armes ont également été fournies aux hommes de Hissène Habré pour le succès de certaines opérations militaires.
Des départements de l’armée tchadienne ont également bénéficié du soutien de conseillers français, de même que l’armée française et les services de renseignements français (la DGSE) qui ont, eux aussi, apporté leur appui pour ce qui est de la formation des officiers de la DDS. Cette présence militaire française aux côtés du désormais feu Hissène Habré avait permis de mettre en défaite les forces libyennes présentes dans le nord du Tchad.
Encore plus, dans des circonstances périlleuses, des avions Transall de l’opération « Epervier » ont parfois été utilisés pour transporter des prisonniers du régime. Une contradiction abjecte d’une démocratie qui se veut protectrice des droits de l’homme.
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Des intérêts préservés
Pour la France tout comme les Etats Unis, il était important de fermer les yeux momentanément sur des violations et des crimes imprescriptibles de Hissène Habré. Ceci du fait que l’ex-président tchadien était un allié redoutable et incontournable dans le combat contre la Libye de Mouammar Kadhafi.
Dans cette veine, le président Habré constituait un rempart voire un empêchement efficace contre les visées expansionnistes du guide Libyen dont les forces avaient envahi le nord du Tchad. Ce pays a toujours occupé une place importante dans les stratégies de la politique étrangère de la France en Afrique centrale eu égard à sa position stratégique. Il a, à plusieurs reprises, été sa base militaire pour mener des actions et protéger les intérêts français dans d’autres pays limitrophes à l’instar de la Centrafrique.
A l’évidence, le soutien de la France à Hissène Habré s’est basé sur le maintien de ses intérêts géostratégiques. C’est-à-dire l’extension de son influence dans cette région de l’Afrique. Alors les questions relatives au respect des droits humains passent au second plan. La politique et la diplomatie avaient, en somme, englouti la démocratie et les libertés publiques.
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Tony AMETEPE