Un an après la formation historique du gouvernement d’unité nationale (GNU), l’Afrique du Sud est rattrapée par ses vieux démons politiques. Mardi, alors que le pays marquait symboliquement le premier anniversaire de cette coalition inédite, les fissures se sont brutalement révélées au grand jour. L’Alliance Démocratique (DA), deuxième force du pays et partenaire clé de l’ANC au pouvoir, a porté plainte pour corruption contre la ministre de l’Enseignement supérieur, Nobuhle Nkabane. Une initiative qui révèle les tensions grandissantes au sein d’un exécutif où les querelles d’intérêts prennent le pas sur la stabilité promise aux Sud-Africains.
Le GNU, né de l’échec de l’ANC à conserver sa majorité absolue, vacille aujourd’hui sur ses fondations. Loin de l’esprit de compromis qui devait guider ce mariage de raison entre dix partis aux idéologies variées, c’est désormais une guerre ouverte de procédures, de dénonciations et de rivalités internes qui s’installe. Et au cœur de ces fractures, la défiance persistante entre l’ANC et la DA, minant tout espoir d’une gouvernance cohérente.
Une alliance fracturée par la méfiance et les accusations
Les tensions se sont accentuées ces derniers jours après le limogeage controversé d’un ministre de la DA pour voyage non autorisé à l’étranger, l’opposition interne est montée d’un cran. Samedi dernier, la DA a même claqué la porte du « dialogue national » lancé par Cyril Ramaphosa pour tenter de sauver l’esprit de concertation au sein du GNU. Dans le même temps, les accusations visant Nobuhle Nkabane pour avoir prétendument manipulé des nominations au profit de proches de l’ANC ravivent les soupçons de pratiques clientélistes au sommet de l’État.
Crash mortel à l’aéroport de Mogadiscio : Trois vies fauchées
Plus inquiétant encore, une enquête pour facturation frauduleuse viserait également Thembi Simelane, une autre figure de l’ANC. Ces affaires confirment l’incapacité de la coalition GNU à contenir les dérives, au moment même où le pays est confronté à des défis majeurs : crise de l’électricité, chômage massif, et tensions sociales récurrentes. L’usure du modèle de gouvernance multipartite, dans un contexte de corruption endémique, laisse craindre une paralysie durable de l’action publique.
Lire Aussi : Tentative de coup d’État ou révolte légitime ? Le Kenya à la croisée des chemins
Quels scénarios pour l’après-coalition ?
La crise qui secoue la coalition sud-africaine pose la question de sa survie même. Certains observateurs estiment qu’un éclatement est désormais plausible, tant les attaques en justice et les stratégies de contournement s’intensifient. L’ANC, autrefois hégémonique, doit désormais apprendre à partager le pouvoir avec une opposition qui ne cache pas ses ambitions. Loin d’une simple guerre d’égos, cette cohabitation sous haute tension est un test pour la maturité démocratique du pays.
Fièvre aphteuse : l’Afrique du Sud face à une crise sanitaire à haut risque économique
Si la rupture devait être consommée, l’Afrique du Sud pourrait basculer vers une instabilité institutionnelle, ouvrant la voie à des élections anticipées ou à une recomposition politique inédite. Dans tous les cas, la promesse de « gouvernement d’unité » apparaît aujourd’hui comme un mirage, pris au piège des rivalités internes et d’une culture politique encore marquée par la défiance et la suspicion. Reste à savoir si Cyril Ramaphosa saura reprendre la main, ou si le GNU ne sera bientôt plus qu’un souvenir éphémère d’un pari démocratique manqué.
Sandrine A.