Au cœur de la vie quotidienne en Tunisie, un produit essentiel cristallise soudainement les tensions, mettant en lumière les défis économiques et politiques auxquels le pays est confronté. Le pain, symbole universel de subsistance, est devenu le pivot d’une crise qui a pris une tournure inattendue. Tout a commencé avec une simple déclaration du président de la République, le 27 juillet dernier, exprimant le désir de mettre à la portée de tous les Tunisiens un pain subventionné.
Mais depuis lors, une série d’événements tumultueux a agité les boulangeries qualifiées de « modernes » ou « non classées ». La suspension de leur production a fait éclater au grand jour des problématiques complexes liées à la production de pains spéciaux et à la perception des subventions. Comment une simple initiative a engendré un débat passionné et révélé des enjeux économiques et sociaux profonds en Tunisie ? Quels sont les liens entre la politique et les préoccupations alimentaires de la nation ?
Un pain unique pour tous les tunisiens
Ces derniers mois en Tunisie, les boulangeries traditionnelles qui vendent le pain à 190 millimes manquent cruellement de la farine de blé. Alors des queues interminables se forment devant les boulangeries avec des populations désirant acquérir absolument du pain. Selon le président Kaïs Saïed, cette situation de pénurie est provoquée par une forte spéculation exercée par les boulangeries modernes. Celles-ci sont estimées à environ 1500 dans le pays
« C’est fini aujourd’hui, pour ceux qui veulent vendre du pain non classé. Des mesures doivent être prises pour fournir du pain à tous les tunisiens », a-t-il déclaré dans une vidéo. Il faut souligner que ces boulangeries dites modernes ont été autorisées a1 acheter certains quotas de la farine subventionnée après la révolution de 2011.
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Entre colère et mécontentement
Pour les boulangeries non classées, cette situation est difficile a2 supporter et extrêmement paralysante. « Nous nous trouvons sans revenu. 1500 boulangeries qui emploient 6 à 7 ouvriers chacune sont ferme1es », a dénoncé Abdelbeki Abdellawi. Il craint une vague de licenciement à venir et des artisans en prison faute de moyens pour rembourser leurs crédits ou loyers.
200 boulangers-pâtissiers tunisiens ont donc entamé un sit-in pour dénoncer la décision leur privant de farine de blé subventionnée. « Nous faisons un sit-in par ce qu’on nous a interdit d’exercer notre activité ordinaire qui est la production de baguette », a laissé entendre Mohamed Jamali, président du Groupement des boulangeries modernes. Pour M. Ezzedine Saidane, « ce n’est pas en imposant un prix unique pour le pain que le problème sera résolu »
Selon plusieurs économistes comme Saidane, « C’est l’État qui n’a pas acheté assez de céréales. Il n’y a donc pas assez de farine et donc de pain, à cause d’une crise des finances de publiques qui n’avoue pas. En clair, il s’agit d’un manque d’approvisionnement du marché en farine subventionnée par l’Etat.
Sandrine A.