vendredi, février 14 2025

Au Mali, les autorités de transition ont suscité une onde de choc en annonçant, le 25 septembre 2023, le report indéfini de la prochaine élection présidentielle. Il en est de même avec l’annulation des autres scrutins prévus dans un avenir proche. Bamako pointe du doigt une entreprise française qu’elle accuse d’avoir illégalement accédé à une base de données administratives concernant l’état-civil malien, qualifiant cette action de prise en otage.

Cependant, ces explications des autorités de transition suscitent des doutes et des inquiétudes auprès de la classe politique malienne. Pour cette dernière, tout porte à croire que les militaires au pouvoir font usage une nouvelle fois d’un stratagème pour retourner la situation à leur avantage. Le colonel Goïta et les siens tentent ils de se maintenir au pouvoir ? Le report de la présidentielle à venir au Mali, n’est-ce pas une fuite en avant ?

Un allongement de la transition

D’après les autorités de transition malienne, le report de la présidentielle initialement prévue pour février 2024, est justifié. Car depuis mars 2023, la base de données Ravec, (le recensement administratif à vocation d’État civil), réalisé à partir de 2018 par l’entreprise française Idemia, est arrêtée. En d’autres termes, des données administratives serait prise en « otage » par ladite entreprise.

Le Mali indique que cette société française Idemia refuserait d’opérer le « transfert de propriété du système ». C’est à dire de communiquer le mot de passe nécessaire aux autorités de transition malienne. Un refus qui s’explique par une dette de plus de 5 milliards de FCFA encore non réglée par les militaires au pouvoir. Ces déconvenues impactent naturellement la bonne tenue de la présidentielle.

« Il n’y a pas de litige en cours entre Idemia et les autorités maliennes », a réagi l’entreprise française suite au communiqué des autorités de transition. La société française a même déclaré s’être même efforcée de soutenir le ministère malien de l’Administration territoriale jusqu’en décembre 2022, au-delà de la durée initiale du contrat, malgré d’importants impayés ».

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Des arguments fallacieux des autorités de transition

Pour plusieurs acteurs politiques et analystes de crise malienne, les arguments officiellement invoqués par les autorités maliennes de transition pour faire passer le report de la présidentielle sont inacceptables. Car il y a quelques mois, les contraintes actuelles n’ont pas empêché les autorités maliennes de transition d’organiser et de valider le referendum constitutionnel de juin dernier.

Certains estiment par ailleurs que les militaires au pouvoir, depuis août 2020, n’avaient de toute façon pas l’intention de rendre le pouvoir aussi facilement. Par conséquent, ils recherchent constamment un « bouc émissaire » à leurs incompétences. Alors vu que l’image de la France l’image se dégrade dans tout le Sahel, ils s’en servent pour faire accepter ce report à la population malienne.

« La réalité est toute autre. Le gouvernement de transition du Mali manque de liquidités pour organiser les élections et les partenaires du Mali ont tourné le dos au gouvernement de transition ou ne lui font plus confiance pour accorder des prêts. Vous aurez noté, ce weekend, que le ministre des Affaires étrangères Abdoulaye Diop, lors de son allocution à la tribune des Nations unies, a accusé la France de faire pression sur les institutions financières régionales et internationales afin qu’elles n’accordent pas de prêt ou ne financent pas de projet au Mali. Donc clairement, le gouvernement manque de liquidités pour organiser les élections », estime Oumar Berté, avocat et politologue malien, chercheur associé à l’Université de Rouen.

Pour Maître Mamadou Ismaïla Konaté, avocat et ancien ministre, l’indignation est grande. Le raisonnement des autorités de transition n’est pas du tout tenable et ne vise qu’à tromper l’opinion publique. « C’est non seulement fallacieux, mais cette démarche traduit véritablement la volonté définitivement affichée de se maintenir au pouvoir, en oubliant simplement que la volonté des Maliens doit prendre le pas sur leur volonté individuelle. »

 

Tony A.

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