Dans un climat déjà électrique, la renégociation du contrat entre l’Agence Sénégalaise d’Électrification Rurale (ASER) et l’entreprise espagnole AEE Power EPC a fait surgir un scandale qui secoue les hautes sphères du secteur énergétique au Sénégal. Alors que le nouveau directeur de l’ASER, M. Sène, se félicite d’avoir élargi le projet pour couvrir 1 740 villages au lieu des 1 500 initialement prévus, les critiques se multiplient, pointant des irrégularités et une potentielle usurpation de paternité du projet.
L’ASER est une unité autonome de service du Ministère de l’Energie du Sénégal, chargée de promouvoir l’électrification rurale à travers un soutien aux initiatives au niveau national et au niveau international, en particulier pour développer des projets et programmes d’électrification rurale arrêtés sur la base d’un plan d’électrification rurale défini par la tutelle technique. Ce scandale, qui éclabousse l’image de l’électrification rurale au Sénégal, appelle à une enquête approfondie. Pour l’heure, les citoyens, quant à eux, attendent des réponses claires sur les tenants et aboutissants de cette affaire qui, de toute évidence, n’a pas fini de faire des étincelles.
Une renégociation sous haute tension du Contrat ASER/AEE Power
Le nouveau directeur de l’ASER, dans un discours triomphaliste, a souligné les avantages de cette renégociation qui, selon lui, devrait permettre d’électrifier plus de villages et de transférer des compétences à de jeunes Sénégalais. Cependant, cet optimisme est loin d’être partagé par tous. Baba Diallo, l’ancien directeur de l’ASER, bien que poli dans ses propos, n’a pas manqué de nuancer ce tableau idyllique.
Selon lui, le contrat initial prévoyait déjà l’électrification de 1 600 villages, même si le chiffre officiel était de 1 500, pour un coût de 91,834 milliards FCFA. Il rappelle que ce contrat, présenté comme une offre spontanée, incluait la réalisation de centaines de kilomètres de lignes basse et moyenne tension.
Mais ce que M. Sène appelle une « renégociation bénéfique » laisse perplexes certains observateurs qui y voient une minimisation des efforts précédents et des manœuvres visant à redorer l’image de la nouvelle direction de l’ASER. Les critiques s’élèvent également contre l’absence de transparence entourant cette renégociation, alimentant les soupçons d’un accord secret entre l’État sénégalais et AEE Power EPC, au détriment des intérêts nationaux.
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Accusations de vol de paternité et soupçon de corruption
Au-delà des chiffres et des promesses, un autre aspect du scandale attire l’attention : les accusations de vol de paternité de projet portées contre l’ASER. Selon des sources proches du dossier, AEE Power Sénégal, l’entité nationale, serait à l’origine du projet d’électrification rurale. Pourtant, l’entreprise espagnole aurait évincé son partenaire sénégalais en invoquant une prétendue perte de confiance.
Ce coup de théâtre a laissé AEE Power Sénégal sur le carreau, l’empêchant de contribuer au développement de son propre pays. Cette situation selon certains observateurs un défaut de préférence nationale et de patriotisme tant prônés par le gouvernement.
Le scandale prend une dimension encore plus explosive avec l’apparition de rumeurs de corruption. Des allégations circulent selon lesquelles des proches du nouveau régime auraient reçu des pots-de-vin d’environ 7 millions d’euros pour favoriser AEE Power EPC au détriment de l’entreprise sénégalaise. Si ces accusations sont avérées, elles révéleraient un profond dysfonctionnement au cœur de l’État sénégalais, où l’intérêt national semble avoir été sacrifié sur l’autel des intérêts privés.
Cheikhou Seck