lundi, novembre 25 2024

S’il y a un continent qui fait le plus parlé de lui en matière de coup d’Etat, c’est bien l’Afrique. Sur ce continent, pour un « oui » ou un « non », les militaires peuvent prendre les armes et destituer l’autorité démocratiquement élue. Smail Chergui donne son point de vue sur ce fait. A chaque coup de force, les putschistes semblent avoir le même argument : restaurer la démocratie, résoudre les problèmes socio-politiques etc. N’y-a-t-il pas d’autres solutions ? Faut-il privilégier les putschs pour résoudre les conflits socio-politiques ?

En Afrique, les armes semblent être les moyens les plus idoines pour évincer un régime politique, qu’il soit démocratique ou pas. C’est ce qui se passe actuellement au Mali où l’armée a cru indispensable d’intervenir pour résoudre la crise socio-politique qui écume le pays depuis plus de 4 mois. L’action des militaires a été applaudie de part et d’autre au Mali et dans le reste du continent.

Certains africains, qui luttent également pour se libérer des jougs dictatoriaux, n’ont pas manqué l’occasion pour appeler leurs armées à suivre le pas de celle du Mali. C’est à croire qu’aucune autre issue ne semble possible, malgré la présence de la CEDEAO et de l’UA.

Pour ces africains, qui ne manquent pas de réagir sur les réseaux sociaux, on ne peut pas parler de coup d’Etat au Mali, mais plutôt de révolution. Ils estiment que l’action de l’armée était nécessaire, car elle répond aux exigences légitimes du peuple souverain.

Cependant, ce nième coup de force au Mali a été condamné, à l’unanimité, par la communauté internationale, appelant à la restauration de l’ordre constitutionnel. La CEDEAO a, quant à elle, infligé des sanctions au Mali.

D’abord, les frontières terrestres et aériennes en direction du pays sont fermées. Ensuite, l’institution sous-régionale réclame la restauration du président évincé, Ibrahim Keita, dans ses fonctions. Enfin, la CEDEAO a dépêché une mission auprès des nouvelles autorités maliennes pour trouver des solutions à la situation actuelle (le coup d’Etat a plongé le pays dans un vide constitutionnel).

Smail Chergui de l’UA : « les coups d’Etat doivent être bannis d’Afrique »

Pour l’Algérien Smail Chergui, Commissaire Paix et sécurité de l’Union Africaine, aucun argument ne doit justifier un coup de force militaire pour destituer une autorité démocratiquement élue. Lorsque nos confrères de RFI lui font observer que les auteurs du Coup d’Etat affirment qu’ils ont été obligés de prendre leurs responsabilités devant le peuple, car le Mali sombrait de jour en jour dans « le chaos, l’anarchie et l’insécurité », Smail Chergui répond : « Oui.

Evidemment, on peut avancer tout argument ou toute argutie qu’on veut. L’essentiel, c’est que la situation a été difficile, qu’il y avait des glissements dangereux. Mais, je pense que le dialogue n’a jamais été rompu entre ceux qui sont descendus dans la rue et le gouvernement ».

Smail Chergui ajoute : « Et je pense qu’avec un peu de patience et de responsabilité, on aurait pu trouver une issue pacifique dans le respect des institutions et de la constitution du pays. Donc, les coups d’Etat doivent être bannis de l’Afrique ».
« Mais, vous voyez bien que, si dans n’importe quel pays demain, quand les voies du dialogue se trouvent momentanément bloquées, les gens de l’armée descendent et prennent le pouvoir, où va-t-on arriver comme ça ? » se demande Smail Chergui.

Du copier-coller qui inquiète

Si les coups d’Etat devaient résoudre les problèmes politiques en Afrique, il y’a longtemps que l’Afrique serait stable. D’ailleurs, les officiers maliens n’auraient pas eu besoin d’intervenir avec leurs armes comme ils l’ont fait mardi dernier, puisqu’en 2012 il y avait un coup d’Etat censé redresser le pays. Mais que nenni.

Le camp de Kati, l’arrestation des personnalités politiques, la démission forcée du président et l’instauration d’un comité de transition… le déroulé des évènements de mardi et mercredi derniers rappellent, malheureusement, le putsch de 2012. Un triste rappel qui revive les souvenirs du bras de fer entre la CEDEAO et les putschistes d’alors. Les nouveaux putschistes de 2020 ont probablement participé au putsch de 2012.

« …Absolument. Ensuite, l’emprisonnement du Président dans ce même camp et le fait que, avant même qu’il ne parte, on lui demande aussi de dissoudre l’Assemblée, ce qui évidemment ne laisse aucune possibilité de continuer dans l’ordre constitutionnel. C’est pour créer une même situation, de vide pour forcer une transition », déplore Smail Chergui.

Somme toute, l’Afrique est très malade de par ses différentes politiques. La démocratie tant recherchée piétine toujours, à tel point que l’on ait besoin de recourir aux armes pour des questions politiques et sociales. Dans toute cette situation, les institutions régionales et sous-régionales ont une part de responsabilité, car incapables de résoudre les conflits en s’appuyant sur les vrais besoins populaires.

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